Quatorze ans après leur dernier album All Hours (2011), le trio new-yorkais Ivy ressurgit avec Traces of You — un disque aussi inattendu qu’émouvant.
Fondé en 1994, le groupe réunit Dominique Durand (chant), Andy Chase (guitare, claviers, production) et Adam Schlesinger (basse, guitare, composition, également leader de Fountains of Wayne).

Leur pop élégante et feutrée, à la croisée du dream-pop et de l’indie new-yorkais, a marqué les années 2000 avec des albums cultes comme Apartment Life ou Long Distance.

La disparition d’Adam Schlesinger en 2020, victime de la Covid-19, semblait avoir définitivement clos l’histoire du groupe. Mais c’était sans compter sur la volonté de Dominique Durand et Andy Chase de lui rendre hommage. En explorant les archives d’Ivy, ils ont exhumé des démos, des fragments vocaux et instrumentaux laissés inachevés.

 Dominique Durand et Andy Chase n’étaient pas seuls dans cette démarche : Richard Curran (cordes), Eric Matthews (trompette, guitare) ainsi que les anciens membres de Fountains of Wayne, Jody Porter (guitare) et Brian Young (batterie), ont également participé au projet.

Ainsi est né Traces of You – un album posthume et vivant à la fois – produit avec Bruce Driscoll (Blondefire), et publié le 5 septembre 2025 chez Bar/None Records.

La pochette s’inscrit dans la tradition visuelle d’Ivy : minimaliste, lumineuse et rêveuse.

1. The Midnight Hour

L’album s’ouvre tout en douceur. Des guitares légères, une basse feutrée, la voix singulière de Dominique Durand, avec les “doo doo doo” qui restent en tête…Le morceau était initialement proposé pour un film ; Ivy avait enregistré le premier couplet + refrain pour ce projet, mais la chanson n’a pas été retenue.
Une chanson suspendue dans le temps : le ton est donné, Traces of You sera un voyage à travers la mémoire.

2. Fragile People

Basée sur une démo de 2007, cette chanson explore la vulnérabilité humaine.
Les nappes de synthé se mêlent aux harmonies vaporeuses.
« Fragile People » aborde le deuil et la fragilité de la vie de manière universelle, touchant particulièrement ceux qui ont perdu un être cher.

La chanteuse française confiait : « Sans le vouloir, cette chanson a suscité en nous une profonde mélancolie à propos d’Adam. Elle est influencée par la perte d’un être comme lui, mais nous l’avons fait de manière très subtile. Il y a une dimension fantomatique dans le sens des paroles. »

3. Mystery Girl

Un des morceaux les plus pop du disque. Mélodie accrocheuse, rythme léger, texte empreint de mystère — Ivy retrouve ici la fraîcheur mélodique qui a toujours fait sa signature.

4. Traces of You

Pièce maîtresse de l’album, tout y respire la perte et la tendresse.
« All the innocent days when we used to play… it feels strange now ».
Les arrangements de cordes de Richard Curran ajoutent une profondeur émotive rare.
Un hommage implicite à Adam Schlesinger, mais aussi à la beauté fugace des liens humains.

5. The Great Unknown

Un morceau électro-rock entraînant, au refrain accrocheur.
Les harmonies planantes rappellent le meilleur de l’album Long Distance sorti en 2000.

6. Say You Will

Premier single et sans doute l’un des titres les plus accessibles.
Un tempo fluide, une mélodie lumineuse, un refrain d’une évidence pop.
Créé à partir d’une démo de 2009, on y retrouve la basse et les claviers joués par Adam Schlesinger.

7. Heartbreak

Les cuivres discrets d’Eric Matthews et la production cristalline de Bruce Driscoll en font un sommet du disque.
Un écho évident à Apartment Life (1997) : joyeusement entraînant, doté de trompettes éclatantes et d’un refrain irrésistible.

8. Lose It All

Une ambiance plus electro. Dominique Durand y chante avec une élégance distante, laissant percer la mélancolie dans les refrains.
Un morceau sur le risque d’aimer et de tout perdre

Selon KOOP Radio, “Lose It All” avait initialement une ambiance proche des Pet Shop Boys dans sa démo première, mais la version finale a été ralentie et enrichie avec des cordes luxuriantes pour la rendre plus introspective.

9. Wasting Time

Les guitares y sont plus présentes, soutenues par un groove discret.
On y perçoit la main d’Adam Schlesinger dans les harmonies vocales.
Un titre sur le regret et le temps qui s’échappe.

10. Hate That It’s True

La chanson de clôture de l’album. Le morceau est construit sur une guitare acoustique jouée par Adam Schlesinger.

Un souffle intime, et cette phrase : “I hate that it’s true.”
C’est Ivy au plus sincère : poignant et tendre, un adieu vibrant, porté par le murmure final de la chanteuse — “I still love you.”

Avec Traces of You, Ivy signe un retour à la fois inattendu et nécessaire. Traces of You est plus qu’un album posthume : c’est un disque du souvenir et de l’amitié.
Les compositions, finement retravaillées, gardent la chaleur et la simplicité caractéristiques d’Ivy.
La voix de Dominique Durand, douce et distante, agit comme un fil conducteur.

L’ensemble est d’une cohérence remarquable, malgré les origines variées des morceaux. La production moderne ne trahit jamais l’esprit originel : elle le sublime.

Un retour bouleversant, empreint de grâce et de nostalgie.